Aujourd’hui, je me débranche. Le temps d’une soirée, voire d’une nuit. Je reviendrai au combat demain.
Voilà déjà 12 jours que ma chérie et moi sommes confinées à la maison.
Douze jours…
Pourtant, on a l’impression que ça fait deux mois!
Aujourd’hui, j’ai besoin de me détacher un peu de ce feu roulant d’actualité dédiée uniquement à l’ennemi public mondial no 1 : le coronavirus, CoVid-19 ou SARS-Cov-2.
Difficile de faire le bilan d’une crise qui commence à peine.
Nous sommes déjà effrayés par cette bibitte issue d’un marché de Wuhan avant Noël alors qu’elle atteint déjà les coins les plus reculés de la planète.
Nous sommes effrayés par les 1339 cas annoncés aujourd’hui, alors que ce n’est que la pointe de l’Iceberg.
Selon les projections de Santé publique Québec, nous devrions atteindre près de 18 000 cas d’ici la mi-avril.
Combien en mai? En juin? Difficile de prévoir. Tout dépendra de la propension des Québécois à respecter les consignes.
Québec se veut rassurant. Nous avons les capacités d’offrir les soins adéquats à tous les contaminés aux prises avec des symptômes sévères si nous faisons collectivement tout ce qu’il faut pour aplatir cette fameuse courbe.
18 000 cas, ça veut dire environ 3200 hospitalisations et la province compte en ce moment su près de 6000 lits.
Jusqu’à présent, une très grande majorité des Québécois respecte les consignes de lavage des mains, de distanciation sociale et de confinement.
…..
Malgré tout, les histoires d’horreur sortent dans les médias.
Mais on est loin des scènes d’horreur que l’on voit dans les films d’épouvante ou de guerre.
À l’heure du Covid 19, une histoire d’horreur, c’est une histoire qui rapporte tout ce qui était de plus banal il y a quelques semaines à peine.
Une histoire d’horreur, made in 2020, ce sont ces jeunes qui décident de faire le party malgré la demande incessante à cesser de se regrouper.
L’histoire d’horreur, en 2020, c’est papy qui va au centre d’achat pour valider ses billets de loterie et boire en café avec sa gang de vieux chums habituelle.
L’histoire d’horreur dans ces nouvelles « années 20 », ce sont ces groupes enfants qui jouent ensemble dans un parc.
L’histoire d’horreur en ce début des années 20, c’est prendre le métro alors qu’on tousse et qu’on répand le virus autour de soi.
L’horreur en cette 3e décennie du 3e millénaire, c’est de se foutre des autres en voulant côtoyer ses semblables.
On en est rendus là.
L’horreur, c’est de faire ce qui fait de nous des humains.
L’horreur, ce sont nos comportements grégaires qui sont devenus le pire des vices.
Notre principale force est devenue notre faiblesse.
Ce virulent CoVid 19 profite de notre plus grande force pour en faire notre plus grande faiblesse : notre capacité à nous rassembler, à s’épauler, à se réconforter à s’entraider, à se donner un coup de main, une tape dans le dos, offrir son épaule ou se prendre dans nos bras devient notre plus grande vulnérabilité.
Tous ces gestes de proximité qui font de nous des humains, qui font partie de nos besoins essentiels sont désormais honnis par mesure de sécurité.
Alors que notre désir de proximité est d’ordinaire notre force, la distanciation et le cloisonnement sont rendues nos principales armes de guerre.
En un sens, il n’aura jamais été aussi facile de faire une différence.
« Restez chez vous et vous sauverez des vies » entendons-nous de la bouche de tous les hommes et toutes les femmes d’État, de toutes les tribunes, des médias traditionnels aux médias sociaux.
Notre fil Facebook ne comporte désormais que trois types de posts : Les nouvelles portant sur le nombre de cas, hospitalisations et décès, les consignes de salubrités répétées à qui mieux mieux et les blagues afin de nous redonner un peu le sourire ou évacuer l’anxiété générée par les deux premières catégories.
Jamais un seul sujet n’aura jamais généré autant de mèmes et autres blagues de circonstance!
Les gens confinés à la maison n’ayant pratiquement rien que ça à faire multiplient les efforts pour trouver la manière la plus ridicule de traiter du sujet.
Et les mèmes qui me marquent le plus sont ces vignettes en deux temps où l’on présente l’image de ce que l’on s’imaginait avoir l’air lorsque nous pensions devoir nous battre au temps de l’apocalypse (souvent une image de guerrière ou super héros) et l’autre image, la version la plus cocooning de notre personne, en pyjama, pantoufles aux pieds, café à la main.
Voilà, le guerrier ou la guerrière du 21e siècle n’est plus vêtu de l’armure de combat la plus sophistiquée, mais d’un pyjama à carreaux!
La classe quoi!
J’imagine déjà les films apocalyptiques d’hier, revus et revisités : « Netflix and chill : quand Bob et Nancy sauvaient le monde »…
…..
Mais ça, c’est oublier qui sont les véritables guerrières et guerriers de ce monde quasi apocalyptique post-moderne.
L’uniforme de notre armée de héros et d’héroïnes est composé de gants en latex et de masques respiratoires.
Au cœur de cette crise sanitaire mondiale sans précédent, il y a tout ce personnel de la santé qui est déjà au front et qui , jour après jour, et y resteront jusqu’au moment ou aura réussi à faire descendre cette foutue courbe comme la Chine vient tout juste de réussir à le faire.
Mais nous n’en sommes vraiment pas encore là.
Le mot d’ordre est le même partout : « aplatissons cette (foutue) courbe! » afin de pouvoir traiter et soigner tout le monde.
Ralentissons la vitesse de cette contamination afin qu’elle soit moins fulgurante et plus gérable pour nos héros en uniformes blancs et bleus.
Voilà où se trouve le nœud de cette guerre sans merci.
Laissons de côté nos instincts grégaires et devenons les plus grands héros de salon que nous sommes capables d’être, afin de soutenir dans cette guerre nos guerriers du système de santé et qui ont toute mon admiration.
Mais ce portrait est incomplet.
Dans l’ombre, pas directement au front, mais essentiel à toutes les guerres, se trouvent tous ceux et celles qui travaillent au ravitaillement. Ils sont aussi des héros, malheureusement trop souvent oubliés.
Tous ces guerriers de l’alimentation et de l’approvisionnement en produits essentiels, ces agricultrices et ces camionneurs, ces caissières, ces étalagistes, ces ouvriers, qui chaque jour, font le nécessaire pour que les guerrières masquées et les guerriers en pyjamas puissent survivre à l’apocalypse et remporter le combat contre cette peste moderne qu’est le coronavirus.
Faisant partie de la catégorie d’héroïne en pyjamas. Cette crise réveille mes vieux réflexes de journaliste et je n’ai pour le moment comme arme que ma plume pour vous aider et diffuser tous ces messages d’intérêt public. Pour lutter contre la désinformation, les fake news et les théories du complot.
Aujourd’hui, je voulais prendre mon clavier, taper mes 999 mots, pour vous dire à quel point je suis derrière vous.
Car de mon côté, la guerre est plus facile que pour vous, je suis relativement à l’abri du virus dans mon duplex de semi-banlieue.
Je me sens souvent inutile dans cette guerre bactériologique, mais si je peux vous offrir un maximum de soutien moral, vous pouvez compter sur moi.
Si l’on pouvait poster du courage et des câlins, je vous en enverrais au moins deux containers…
Courage! On lâche pas gang! Ensemble, on va passer à travers.
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